• Formatage numérique : Andy Ihnatko Kindle 2, Kindle 3, and iPad

Je m’édite – 7 – Le formatage numérique

Des caractères qui changent de taille au cours d’une phrase. Des listes dont les puces disparaissent hors des marges de l’appareil. Des mots bizarrement sectionnés. Des images décalées par rapport à leur légende. Dans le numérique, tout est possible, surtout ce que vous n’avez pas prévu. Perfides, les machines transforment le fichier qui fonctionnait si bien sur votre ordinateur en un bouillon typographique indigne de la publication.

Vous avez l’impression d’être impuissant face à ce phénomène ? Détrompez-vous ! En réalité, les diverses liseuses, tablettes et applications n’inventent rien, elles ne font que mettre en évidence les codes cachés de votre fichier de traitement de textes. Depuis sa création, vous l’avez modifié mille fois, superposant les formatages mieux que sur un palimpseste. Au détour d’une phrase, une espace conserve un ancien style ou une apostrophe a changé de sens. Ce titre qui semble parfaitement centré résulte en fait d’une addition de tabulations. Quant à ce faux point de suspension, la machine n’est pas dupe : elle y voit trois points successifs, c’est-à-dire trois fins de phrases.

Le problème, c’est que vous ne pourrez pas rendre ces codes visibles. Vous constaterez leur existence quand un lecteur enragé vous signalera que les lignes de votre roman se chevauchent ou que le titre d’un chapitre est tronqué. Quel que soit le logiciel que vous utiliserez pour convertir votre fichier de traitement de textes en livre numérique, ces serpents de mers ne disparaîtront pas tout seuls.

Une approche radicale consisterait à copier tout votre texte et à le coller dans un éditeur de format texte, comme le bloc-notes de Windows. Évidemment, vous perdriez vos italiques, vos caractères gras et tous vos styles, mais les codes-fantômes disparaîtraient eux aussi. Il ne vous resterait plus qu’à chasser les tabulations, les faux points de suspension, les espaces insécables mal placées (on dit une espace) et tous les caractères spéciaux.

Un bienfaiteur de l’humanité autoéditrice

Que faire alors ? Prier ? Faire appel à un pro ? J’en étais là de mes réflexions quand j’ai découvert Guido Henkel, un compositeur, romancier, graphiste et professionnel du jeu vidéo de nationalité allemande. Henkel est – entre autres – l’auteur d’une série de billets de blog (en anglais) consacrés au formatage numérique, Take pride in your eBook formatting, repris ensuite sous la forme d’un livre numérique intitulé The Zen of eBook Formatting. Pour être tout à fait juste, j’avoue que j’ai trouvé cette référence chez David Gaughran, dans son livre Passons au numérique. Les billets de ce bienfaiteur germanique constituent simplement la meilleure solution actuelle au problème du formatage des livres numériques.

La méthode

Je m’en voudrais de livrer ici toutes les ficelles de sa méthode, mais qu’il me soit permis d’en décrire les grandes lignes.

1) Nettoyer le manuscrit

La première étape consiste à effectuer une recherche fondée sur le principe des « expressions rationnelles », afin de remplacer toutes les chaînes d’italiques, de gras et de gras italiques par les mêmes chaînes encadrées de balises HTML. Par exemple,

Mon grand ami Philibert Lecointre

devient

Mon <i>grand</i> ami <b>Philibert <i>Lecointre</i></b>

Une correction manuelle est nécessaire pour toutes les chaînes dépassant une ligne. Par exemple,

<i>Il est temps

De rentrer</i>

Devient

<i>Il est temps</i>

<i>De rentrer</i>

2) Création du fichier HTML

On crée ensuite un fichier HTML dans un éditeur de textes tel que Notepad++, dont le début contient quelques lignes de code fournies par Henkel. On copie tout le texte du traitement de textes et on le colle dans l’éditeur. Abracadabra : il perd immédiatement son formatage, mais conserve les fameuses balises, qui indiqueront les italiques et les gras.

3) Interventions sur le fichier HTML

En utilisant une fois de plus les expressions rationnelles, on place alors des balises de paragraphes <p> et </p> devant et derrière chaque ligne de texte. Les autres interventions concernent les caractères spéciaux, qu’on remplace par des codes, les paragraphes centrés, les images, les en-têtes de chapitres, etc. Pas à pas, le fichier HTML recouvre ses attributs visuels, qu’il est possible de découvrir sur un navigateur internet. Au début de ce fichier, Henkel place des lignes de code qui indiquent comment tel ou tel aspect du texte doit être affiché. Il s’agit d’une feuille de style en cascade intégrée au fichier. Point besoin d’être spécialiste de l’informatique : les explications de l’auteur sont largement suffisantes pour obtenir l’effet souhaité.

Ces quelques lignes ne sont destinées qu’à vous donner un avant-goût de la procédure mise en place par Guido Henkel. Je ne puis que vous encourager à consulter les billets originaux ou à acheter le livre comme je l’ai fait. Vous posséderez alors une longueur d’avance sur la plupart des autoéditeurs, et même sur certains éditeurs professionnels, qui publient régulièrement des livres souffrant de défauts typographiques. Preuve supplémentaire que le numérique constitue un nouveau territoire, où les meilleurs ne sont pas forcément les plus gros… (ceci est un vrai point de suspension!)

2 Comments

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    Bernard Giroud 2 mars 2015 (21 h 27 min)

    Je retiens l’idée de convertir les styles italiques en balises HTML. Cela pourrait servir.

    Cela dit, personnellement, je passe par des macros OfficeBasic et des scripts bash sous GNU/Linux pour faire tout le travail de publication.

    P.S.: je trouve que votre feuille de style cascade vraiment trop 😉 !

    • comment-avatar
      admin 2 mars 2015 (21 h 44 min)

      Le problème, avec les macros de conversion, c’est qu’on ne maîtrise pas le code d’origine. Cela dit, ça peut marcher si le texte a été produit dans des conditions uniformes. Personnellement, j’aime bien savoir ce que j’ai dans le moteur. C’est mon côté bricolo.

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