« Malgré lui, il s’arrêta quelques secondes avant de traverser la rue, fasciné par la lutte des sapeurs de trois casernes contre ce feu d’entrepôt qui semblait impossible à vaincre. Même à la distance où il se trouvait, le souffle de l’incendie lui brûlait le visage et le faisait transpirer dans ses vêtements d’hiver. L’eau qui s’écoulait des lignes hydrauliques reflétait les lueurs orangées du brasier. Malgré la brise hivernale, l’air était chargé d’une âcre odeur de bois brûlé.

C’était la première fois qu’il assistait à un brasier de cette importance. Le spectacle lui rappelait le cyclone qui avait arraché le toit d’un hôtel où il séjournait avec Sophie, son ex-femme, et la chute d’un éclair sur le tilleul de ses parents. Il s’étonna de ressentir, face à la violence de ce monstre incandescent, une forme de joie, comme s’il s’identifiait à la sauvagerie de cette force naturelle. Il se demanda si les pyromanes éprouvaient un sentiment similaire, tellement puissant qu’ils ne cherchaient plus qu’à le reproduire. »