Comme on l’a vu dans un billet précédent, le formatage numérique consiste en une série d’opérations techniques où les choix esthétiques occupent une place relativement limitée. Il n’en est pas de même de la mise en page des livres imprimés, qui relève des compétences du graphiste – du typographe, si on préfère un mot plus noble et plus ancien. S’il ne dispose pas de ces compétences et de la pratique correspondante, l’auteur auto-édité débutant qui désire offrir une version papier de ses ouvrages (par le biais de CreateSpace, par exemple) risque de commettre des erreurs qui signaleront immédiatement ses livres papier comme des bricolages d’amateur. Les écueils, en effet, sont innombrables :

Je me suis limité à dix exemples, mais j’aurais pu aisément en trouver cent. La liste est si imposante qu’aucun ouvrage publié par un éditeur n’y échappe tout à fait. Dans ce billet, je ne chercherai pas à vous préserver de tous les défauts possibles, mais à limiter les plus importants, afin que vos lecteurs ne soient pas gêner par ceux qui restent.

Pas de résultat professionnel sans outils professionnels

Peut-on créer une mise en page de qualité sur un traitement de textes ? En théorie, rien ne s’y oppose – du moins tant que cette mise en page n’exige pas de fonctions avancées. Il suffit pour cela de savoir précisément où et comment placer chaque élément de la page et du livre. Si vous êtes graphiste, vous devriez y arriver sans trop de difficulté. Mais dans le cas contraire, un logiciel professionnel de mise en page vous fournira l’aide dont vous avez besoin pour obtenir un résultat convaincant.

Un seul exemple : pour éviter les veuves (premières lignes de paragraphes isolées en bas d’une page) et les orphelines (dernière lignes de paragraphes isolées au début d’une page), il est possible de modifier subtilement l’espace entre les mots et l’espace à l’intérieur des mots. Avec un traitement de texte, cela s’avère, au mieux, très difficile. Avec un logiciel tel que InDesign, un algorithme calcule à votre place la meilleure solution et place lignes et mots en respectant des limites que vous pouvez aisément modifier.

Il existe, bien sûr, des solutions gratuites, en particulier Scribus. Nul doute que Scribus permette de réaliser des mises en page de très bonne qualité, au point que des magazines s’en servent pour réaliser leur maquette (Le Tigre). Ce n’est pourtant le logiciel que je vous recommande, parce qu’il n’existe que très peu de modèles (templates) au format Scribus.

Des modèles de mise en page au service de votre projet

De nombreux gabarits ou modèles sont disponibles, destinés à faciliter la mise en page d’un livre sur InDesign :

Ces modèles de qualité variable vous fourniront d’abord une mise en page générale, avec des marges bien placées, des numéros de pages positionnés au bon endroit, une grille de base proportionnelle aux dimensions du cadre de texte. Ensuite, vous disposerez de styles de paragraphes qui vous permettront de créer en un clic vos titres de chapitres, blocs de citations, premiers paragraphes de chapitres avec lettrines, faux titres, dédicaces, etc. Idéalement, un modèle devrait comporter une série de pages-types qui vous montreront concrètement comment l’utiliser. Enfin, un guide ou mode d’emploi me semble indispensable, car il permet de travailler conformément aux intentions initiales des graphistes.

Une alternative (en français) consiste à suivre un tutoriel comme celui de Mediabox. Cette démarche vous apprendra beaucoup, mais je ne la recommande qu’aux auteurs disposant de beaucoup de temps libre !

InDesign sans vous ruiner

À l’heure où j’écris cet article, InDesign est vendu à 941,20 € (information à confirmer, tant elle est difficile à trouver), une somme rondelette que la plupart des auto-édités rechigneront à débourser. Heureusement, deux autres solutions existent : télécharger une version d’essai de 30 jours et prendre un abonnement d’un mois au logiciel (23,99 €) dans le cadres de l’offre Creative Cloud. Vous trouverez tous les détails sur cette page.

4 réponses

  1. Merci. On ne répétera jamais assez qu’un traitement de texte n’est pas l’instrument approprié pour la mise en page. Outre les fonctions manquantes, il y a aussi le temps nécessaire à la réalisation de la maquette. Ce seul facteur peut inciter le plus brave à couper les coins ronds et produire un livre bâclé.

    1. Tout à fait d’accord. Je me sers de moins en moins du traitement du textes. Pour écrire, je préfère Scrivener, qui est peut-être incomplet, mais qui me permet de mieux organiser mon travail.

  2. Bonjour et félicitations pour ce blog qui continue à inspirer encore aujourd’hui les aspirants romanciers !
    Néanmoins, cet article en particulier me laisse perplexe. Tous les écueils qui sont mentionnés dans la première partie n’ont rien à voir, me semble-t-il, avec des manques qui seraient imputables aux traitements de texte. Si je pense à Microsoft Word qui est LA référence du traitement de texte (et probablement le plus utilisé au monde), il sait faire tout cela et bien plus encore depuis littéralement des décennies (c’est précisément grâce à Word que j’ai découvert le concept de veuves/orphelines parce que le nom de la fonctionnalité m’intriguait, et c’était il y a une trentaine d’années !).
    « Pas de résultat professionnel sans outils professionnels », dites-vous, et c’est précisément ce qu’est MS Word : un outil professionnel, incontestablement.
    Par conséquent, votre charge contre les traitements de texte et la promotion d’alternatives me semblent soit fondées sur un malentendu (un défaut de maîtrise de Word ?), soit fondées sur le constat que Word est l’exception qui confirme la règle et qu’hors lui point de salut (mais dans ce cas, l’exception est tellement incontournable qu’elle devrait être mentionnée clairement)… soit il y a quelque chose d’autre qui m’échappe complètement, et vu la pertinence habituelle de vos articles, c’est sans doute l’hypothèse la plus probable !
    Par conséquent, accepteriez-vous développer plus avant en quoi un traitement de texte (je pense bien sûr à Word) ne saurait faire l’affaire ?
    Merci par avance pour vos éclaircissements !

    1. Bonjour Tyrell,
      Je vous prie d’excuser ma réponse tardive. Votre commentaire s’était perdu dans la foule de spams que je reçois chaque semaine.
      Pour vous répondre, Word est bien un traitement de texte professionnel, très utile dans la rédaction d’un livre ou d’un article, mais la mise en page relève d’une logique très différente.
      Un texte word est une sorte de page web améliorée, dont les balises sont invisibles. Vous croyez voir le contenu du fichier ; en réalité, vous n’avez accès qu’à l’impression à l’écran du résultat d’une série d’instructions. Un peu comme si vous étiez l’un des humains prisonniers de la caverne de Platon et regardant une image de votre fichier sur la paroi. Tant que tout va bien, les coulisses de votre texte ne vous intéressent pas. Mais je peux vous assurer qu’un jour, quelque chose tournera mal, vous verrez votre formatage tomber en morceaux, vos polices de caractères sauter, vos alignements refuser de s’aligner, etc.
      Un logiciel de mise en page est fondé sur des principes tout à fait différents. Plutôt de de donner forme à une page web aux balises invisibles, il construit le livre à partir d’une grille inamovible où sont placés des cadres de texte et d’images. Vous avez le contrôle absolu, non sur votre texte, mais sur l’apparence de la page. Vous ne serez jamais trahi par des paramètres que vous ne pouvez pas voir. Votre pdf final sera lui aussi professionnel, c’est-à-dire prêt à être envoyé à l’imprimeur. Le logiciel vous signalera tout problème et vous permettra d’effectuer des réglages extrêmement précis. Vous n’aurez aucune mauvaise surprise et votre imprimeur sera content.
      En conclusion, vous avez raison de taper votre texte sur Word et de le corriger à l’aide de tous les outils disponibles. Mais pour produire le pdf, vous avez besoin d’un logiciel de mise en page, comme InDesign, Affinity Publisher ou à la rigueur le gratuit Scribus.

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